Nouvelle étude de l’IRIS : augmenter les salaires n’augmente pas l’inflation

La meilleure stratégie pour contrer les effets de l’inflation serait d’augmenter les salaires

La thèse de la spirale inflationniste provoquée par les salaires ne résiste pas à l’épreuve des faits. Ces faits, on les retrouve dans une nouvelle étude que l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) a fait paraître le 1er juin 2023.

C’est maintenant prouvé : il est possible d’ajuster les salaires au coût de la vie sans hausser de manière significative et durable le niveau des prix. L’étude démontre que la spirale inflationniste annoncée n’existe pas, et que les hausses de salaire ne sont pas annulées par une hausse équivalente de l’inflation. Les ménages en sortent gagnants.

« Du côté des travailleuses et des travailleurs, à partir du moment où on réussit à négocier des augmentations qui couvrent l’inflation, elle n’est plus un problème, car notre pouvoir d’achat reste le même », explique Pierre-Antoine Harvey, économiste à la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

Les chercheurs de l’IRIS estiment même que la meilleure stratégie pour combattre les effets de l’inflation serait d’augmenter les salaires.

Lire l’étude de l’IRIS

 

Protéger le pouvoir d’achat

Selon l’IRIS, les données historiques démontrent que d’aider les ménages à conserver leur pouvoir d’achat en contexte d’inflation (en augmentant les salaires, par exemple) n’a pas d’impact significatif sur le niveau des prix autant à court qu’à long terme.

Le scénario le plus pessimiste de l’IRIS révèle qu’un rattrapage des salaires de 7,3 % supplémentaire sur un an ferait augmenter le niveau des prix au plus de 1,6 % de plus que les prévisions actuelles sur trois ans.

« Les données recueillies ne confirment pas l’existence d’une spirale salaires-inflation, malgré sa simplicité et son apparente évidence, souligne Eve-Lyne Couturier, chercheuse à l’IRIS. Ce concept guide pourtant bon nombre de décisions de la Banque du Canada qui demande aujourd’hui aux entreprises et aux gouvernements de ne pas ajuster les salaires à l’inflation. »

Une inflation dure sur le portefeuille, mais douce pour certaines entreprises

Entre avril 2020 et avril 2023, le niveau des prix a augmenté d’environ 75 % de plus que le revenu médian au Québec.

Une personne qui gagne le revenu hebdomadaire médian a vu son pouvoir d’achat total baisser d’environ 3 100 $ depuis le début de la pandémie, alors que l’inflation a permis à certaines entreprises d’engranger des profits records. Pensons aux augmentations de salaire dont plusieurs dirigeants de grandes entreprises québécoises ont profité, selon cet article de La Presse.

Pourtant, au lieu de favoriser un rattrapage des salaires à la hausse du niveau des prix, la Banque du Canada privilégie un ralentissement de l’économie pour contenir l’inflation future.

La Banque du Canada pointée du doigt

« La politique monétaire de la Banque du Canada n’est pas neutre: elle crée des perdants et des gagnants. En choisissant d’augmenter les taux d’intérêt, et conséquemment le coût de l’intérêt hypothécaire, la Banque du Canada demande aux ménages d’absorber doublement les coûts de la lutte contre l’inflation. Dans un premier temps, les ménages n’ont pas pu ajuster leurs revenus à l’explosion des prix et là, dans un deuxième temps, ils voient leur emploi menacé par le ralentissement économique et leur facture d’hypothèque exploser », déplore Eve-Lyne Couturier, co-autrice de la note socioéconomique.

La Banque du Canada, en haussant de manière draconienne son taux directeur, nuirait à son propre mandat.

D’une part, 16 % de la surinflation observée au mois de mars dernier est attribuable à la hausse des taux d’intérêt hypothécaires. D’autre part, la hausse des coûts d’emprunt crée un climat économique défavorable aux investissements nécessaires pour augmenter la productivité et accélérer la transition écologique. Ce sont pourtant les deux facteurs de stabilisation des prix à plus long terme, estime l’IRIS.

« Dans un contexte de lutte aux changements climatiques et de crise du logement, il est plus que jamais pertinent de revoir le mandat de la Banque du Canada et de rediscuter démocratiquement de ses objectifs afin qu’elle serve les intérêts de la population et non principalement ceux des créanciers et des détenteurs de capitaux », conclut Raphaël Langevin, chercheur à l’IRIS et co-auteur de l’étude.

 

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